-« J’ai connu la plupart de nos créateurs avant qu’ils deviennent connus. Souvent présentant leur première collection sur un coin de table dans un petit showroom ou sur un lit d'hôtel pendant la fashion week parisienne. »
Stéphanie Roger
Après des années remarquées chez Cartier, Chaumet, Dinh Van, ou encore Chloé, Stéphanie Roger a fondé WHITEbIRD en 2010 pour défendre une joaillerie libre, contemporaine et pleine d’âme.
Dans ses boutiques parisiennes au charme discret, à mi-chemin entre galerie intime et maison de famille, elle sélectionne des créateurs du monde entier avec un regard sûr, guidée par l’émotion plus que par les tendances.
Avec We by WHITEbIRD, la collection maison lancée en 2017, elle signe des bijoux colorés et durables, à l’image de sa vision : un luxe sincère, vivant, accessible.
À l’occasion du lancement de deux nouvelles collections We by WHITEbIRD, Simone & Rosa, elle nous parle ici de son parcours, de ses inspirations, de sa vision éthique de la joaillerie et des rencontres qui l’ont marquée depuis quinze ans.
1. Une histoire de passion
Tu as travaillé pour des maisons de renom comme Cartier, Chaumet, Dinh Van… Qu’est-ce que tu retiens de ces années-là ? Pourquoi la joaillerie ?
L’important au début n’était pas la joaillerie mais travailler à Paris et dans le luxe. J'ai commencé à travailler sur les arts de la table chez Cartier, puis à l'horlogerie chez Piaget puis chez Chaumet. C’est en entrant chez Dinh Van que j’ai eu un vrai coup de cœur pour le bijou. Ces années dans ces belles maisons ont été passionnantes : j’ai tout appris sur le produit alors que je n’y connaissais rien à la fin de mes études de marketing et commerce.
En 2010, tu lances WHITEbIRD. C’était quoi le déclic ? Qu’est-ce que tu avais envie de faire différemment ?
Ça faisait un moment que je m'intéressais à la joaillerie de designer. Je voyageais beaucoup et ça m’a permis de m’ouvrir à d’autres univers plus créatifs et sensibles et de rencontrer des créateurs vivants et passionnés. À 45 ans, après deux ans chez Chloé pas très concluants, j’ai eu envie de faire quelque chose pour moi comme je le sentais. J’ai souvent pris des décisions par intuition et celle-ci en était une !
2. L'aventure We by WHITEbIRD
En 2017, tu lances ta première marque maison : “We by WHITEbIRD”. Qu’est-ce que cette collection raconte de toi, de ton regard sur la joaillerie ?
Au début, je voulais répondre à une demande croissante dans nos boutiques : des bijoux simples, bien faits et qui collent à l’air du temps (mini créoles, anneaux fin, petites chaînes jolies avec un petit motif etc). Ce genre de bijoux n’étaient pas la spécialité de nos créateurs, j’ai senti qu’il fallait que nous le fassions nous-mêmes. C’est comme ça que tout a démarré. Nos premiers bijoux ont été destinés aux femmes qui s'inscrivent à nos sessions piercing que nous avons proposées dans nos boutiques dès 2017.
Je pense que le bijou est un peu comme la mode, il s’enrichit de la variété et des contrastes. Un jean basique convient très bien à un top beaucoup plus élaboré, de la même façon un stacking de collier est fait de pièces discrètes et d’autres plus travaillées. C’est l’homme ou la femme qui va créer son look en fonctions de ses goûts. Chez WHITEbIRD on peut associer deux alliances We by en or avec des bagues à forte personnalité d’un créateur ou l’autre.
Comment développes-tu les collections ?
Au début j’ai beaucoup fait seule, je dessinais des petits croquis que je transmettais à notre atelier et nous nous comprenions très bien. Les compléments de collections sont toujours faits comme ça aujourd’hui. Ensuite j’ai eu d’autres idées de bijoux plus sophistiqués comme une bague d’engagement (Aurore) ou une bague cocktail (Grace) et j’ai travaillé avec une designer qui tenait le crayon.
Peux-tu nous parler des inspirations qui infusent les deux nouvelles collections, Simone et Rosa ?
Pour ces deux nouvelles collections, j’ai choisi de confier le projet à Camille Toupet, avec qui j’avais déjà collaboré à l’époque de Dinh Van. J’avais envie d’ouvrir un nouveau chapitre créatif pour We by, tout en préservant les détails qui font l’essence de la marque depuis sa création : la couleur, le contraste entre mat et poli, la singularité des pierres et des textures.
Les bagues Simone et Rosa sont comme deux amies proches : elles partagent de nombreux points communs tout en affirmant leur propre personnalité. Elles prolongent l’esprit de la bague Diana, dont elles s’inspirent. Diana est une bague très épurée, avec une pierre de couleur en son centre, entourée de petits diamants sur un anneau fil.
Au premier regard, Simone et Rosa reprennent cette structure. Mais à y regarder de plus près, chaque détail révèle des contrastes subtils qui créent l’harmonie. Rosa présente une pierre cabochon, tandis que Simone opte pour une pierre facettée. L’entourage de diamants se complexifie : en dégradé de couleurs pour Rosa, ponctué de petits cabochons colorés pour Simone. Le corps de bague, quant à lui, n’est plus un simple fil mais s’élargit avec des effets mats et polis, propres à chaque modèle.
Les cabochons de Rosa sont composés de pierres légèrement opaques (jade, cornaline, opale rose) tandis que les ovales facettées de Simone jouent sur la transparence (pierre de lune, aigue-marine, préhnite).
Ces deux modèles se déclinent également en boucles d’oreilles, colliers et earcuffs, reprenant leurs couleurs et sertissages singuliers.
3. Lifestyle
Tu passes du temps à l’île d’Yeu, tu vis à Paris : deux lieux, deux rythmes. Qu’est-ce que chacun t’apporte ?
L’ile d’Yeu est un lieu où je suis au plus proche de la nature et de la mer qui me ressourcent. Je jardine beaucoup, c’est une activité qui m’apaise et m’apporte beaucoup de satisfaction. Quand je suis là-bas je passe beaucoup de temps à pied ou à vélo, il y a d'innombrables chemins qui débouchent à un moment ou à un autre sur la mer. Je suis matinale et j’adore me baigner seule de bon matin.
J’aime Paris, son effervescence, la beauté de son architecture, de ses jardins, le ciné, les amis mais au bout de quelques semaines je sature.
Quand tu ne travailles pas, qu’est-ce qui t’inspire, te fait vibrer ?
Le jardinage sur ma petite terrasse parisienne ou à l'île d’yeu, le sport, la céramique que j’ai commencée cette année et qui me rappelle la cuisine que j’aime beaucoup également. J’aime beaucoup voyager en famille ou en couple, m’imprégner de nouveaux lieux, faire corps avec la nature, les randonnées, les bonnes tables, bouquiner au soleil, la mer.
Et si tu devais partager avec nous trois créateurs coup de cœur du moment ?
Trois sur plus de 60 … c’est très dur ! Nadia Shelbaya, Francesca Villa, Talkative que nous lançons prochainement.
Quels sont les bijoux qui ne te quittent jamais ? Pourquoi ?
Deux bagues Dorette, une petite bague Noguchi, un collier We by et un Wwake, mes deux bracelets Dinh van, et deux bracelets Brooke Gregson, des petites boucles pendantes de Sia Taylor. En dehors des bagues je les garde même pour dormir, me doucher, faire du sport, me baigner et souvent j’y ajoute un collier LAH, des boucles Talkative, un petit poisson de Pascale Monvoisin. La plupart de ces bijoux m’ont été offerts par les créateurs, ils ont une valeur sentimentale et ils vont avec tout. Je ne passe pas beaucoup de temps à me préparer le matin, ces bijoux là sont une base à laquelle j’ajoute rapidement une ou deux pièces un peu plus fortes “du moment” ou rien.
4. Le bijou comme rencontre
Tu as rencontré des créateurs du monde entier depuis 2010. Y a-t-il une rencontre qui t’ait particulièrement marquée ?
La plupart des rencontres ont été formidables et singulières. J’ai connu la plupart avant qu’ils deviennent connus. Souvent présentant leur première collection sur un coin de table dans un petit showroom ou sur un lit d'hôtel pendant la fashion week parisienne. Charlotte Chesnais, Bibi Van der Velden, Pippa Small, Sophie Bille Brahe, Fernando Jorge et bien d’autres sont aujourd’hui presque des stars, gagnent des prix, ouvrent des boutiques. Je suis heureuse des souvenirs de nos premières rencontres.
5. La boutique, lieu de cœur
Tu es encore très présente en boutique, tu conseilles les client.es, tu observes leurs gestes… Pourquoi c’est important pour toi de garder ce lien direct ?
Comme je choisis presque chaque bijou, c’est un grand bonheur d’en parler avec des gens qui les aiment comme moi, de les essayer pour eux de les conseiller par rapport à leur style. Quand ils achètent une pièce, je suis heureuse d’avoir fait un bon choix et c’est comme leur leur transmettre un peu de moi.
Tu organises aussi souvent des trunk shows. Qu’est-ce que tu aimes dans ce format ?
J’aime que les gens se rencontrent car WHITEbIRD est une histoire très humaine. C’est l’occasion aussi d’avoir dans la boutique une sélection de pièces beaucoup plus large, que j’aurais aimé acheter mais
Et pour les trois boutiques parisiennes, comment as-tu choisi les emplacements ? Qu’est-ce qui rend chaque boutique unique ?
Pour le Haut Marais, c’était évident pour moi car c’est un quartier de renouveau, de création même si ce n’est pas un quartier de joaillerie.
Nous y avons ouvert un peu après Merci, APC et BONTON. Soeur, Ami, Acné ou Kitsuné se sont installés juste après nous et aujourd’hui encore c’est une partie du Marais un peu atypique : notre voisin est encore un vendeur historique de matériel de photo pour les pros.
Pour la rue des Saints-Pères, c’était plutôt un coup de cœur pour la boutique en particulier car c’est l’ancienne boutique de bijoux vintage du XXe siècle, Karry’O que j’aimais beaucoup et une référence pour les connaisseurs et la presse . Quand j’ai su qu’elle était disponible je n’ai pas hésité d’autant plus que nous cherchions une adresse rive gauche.
10. Quels sont tes projets pour la suite de l’aventure WHITEbIRD ?
Ne rien changer, continuer à dénicher des pépites et les faire découvrir à leurs futurs acquéreurs 🙂
Ce mois-ci nous lançons également la seconde main, un projet que j’avais en tête depuis un moment. Nous reprenons des bijoux de nos créateurs car nous pouvons les authentifier, les dater précisément. C’est à la fois un service pour nos clients historiques qui ont une collection importante qu’ils veulent faire tourner et pour de nouveaux clients qui pourront s’acheter des bijoux en or à des prix plus abordables. Cette activité a d’autant plus de sens aujourd’hui que la hausse du prix de l’or impacte fortement le prix des bijoux récemment fabriqués.
Et on termine avec le rituel du mini portrait chinois :
Si j'étais un bijou : Une bague sans hésiter
Une pierre : toutes
Une fleur : l’hydrangea
Une odeur : la pluie sur une route chaude en été
Un plat : un clafoutis aux cerises (avec noyaux)
Un hobby avoué : les brocantes en province
Un artiste : Aelle, une sculptrice découverte récemment en Bourgogne
Un créateur de mode : Lemaire forever
Un pays : je rêve de faire un long voyage en Iran pour découvrir la culture, les paysages et les gens, si possible à cheval … je vais devoir attendre encore un peu.
BEA BONGIASCA
chez WHITEbIRD
7, BOULEVARD DES FILLES DU CALVAIRE PARIS 3
+33 (0)1 40 24 27 17
BOUTIQUEMARAIS@WHITEBIRDJEWELLERY.COM
Horaires ouverture
Boutiques
Lun : 14h00 - 19h00
Mar - Sam: 11h00 - 19h00
Stéphanie Roger